L’agriculture est la combinaison de deux termes, le premier venant du grec agros signifiant terre ou champs, et le second venant du latin colĕre. Ce dernier était employé dans diverses expressions et comportait plusieurs sens : soigner, entretenir, orner, parer, s’occuper de, veiller sur, s’intéresser à, honorer, vénérer, respecter, habiter, séjourner.
Ne dit-on pas que l’on rend culte à telle divinité ? Ne dit-on pas encore cultiver une amitié, ou bien cultiver une passion ou un don ? Le sens initial me semble bien loin de « l’exploitation du sol » qu’a revêtu l’agriculture moderne…
Lorsque nous avons repris le Potager du Château de Challain, le Maire Monsieur Faure nous a expliqué que ce lieu avait été organisé selon la Croix d’Anjou, et dessinait donc une croix à deux branches horizontales comme la Croix de Lorraine. Il nous avait d’ailleurs indiqué qu’historiquement la Croix de Lorraine venait en fait de l’Anjou, ce qui a éveillé ma curiosité.
Cette croix à double traverse représente la croix du Christ surmontée du Titulus Crucis, planche sur laquelle avait été marquée « Jésus le Nazaréen, roi des Juifs ». Cette croix, appelée la vraie croix, est considérée comme une relique, dont plusieurs fragments sont entrés en Anjou en 1244 et sont encore conservés aujourd’hui à Baugé dans le Maine-et-Loire.
Au travers de divers mariages dans l’Histoire mêlant les royaumes de Hongrie, de Naples et de la maison d’Anjou-Sicile, le roi René d’Anjou hérita de tous ces royaumes, et de la fameuse croix par la même occasion. On retrouve encore cette croix aujourd’hui sur les armoiries de la Hongrie, la Slovaquie, la Lituanie et le Maine-et-Loire. Quant à la Lorraine, c’est suite au mariage de Yolande d’Anjou, fille du roi René, que le Duché de Lorraine reçu le droit d’utiliser la croix dans ses armoiries. Cette croix sera bien entendu rendue célèbre par le Général de Gaulle qui en fit un symbole de la Résistance.
C’est grâce au roi René, et à son héritage, que notre région connaît un grand nombre d’abricots, à l’époque appelés prunes d’Arménie. (et aussi certainement grâce à la douceur angevine !). En effet, c’est lui qui les fit parvenir depuis son royaume de Naples via la Loire. L’autre souche d’implantation de l’abricot se trouve dans la région du Roussillon, via l’Espagne. Quelle ne fut pas ma surprise, lorsque je découvris tous ces abricotiers en Anjou, alors qu’ils sont pratiquement absents de mon Berry natal, et alors que pour moi, ces fruits délicieux restaient une douceur de vacances de mon enfance passée chez mes grands-parents, près de Béziers.
« Cultivons notre jardin », disait un certain Candide. Et si cela signifiait également s’intéresser à l’endroit où nous habitons ?
David
P.S. : « Jésus le Nazaréen, roi des Juifs » ou « Iesus Nazarenus, Rex Ivdaerum » que l’on retrouve sur les tableaux ou les statues par « INRI », hahaha A une lettre près 🙂